Alors, continuer par curiosité, se laisser bercer, il suffit de marcher le long de l’Elbe et de croiser les énormes cargos.
La fille d’Altona précise que l’Elbe, fleuve d’Europe centrale de plus de mille kilomètres, prend sa source en Tchéquie dans les monts des Géants et, après un parcours en majeure partie allemand, se jette dans la mer du Nord par un long estuaire d’une centaine de kilomètres sur lequel se trouve Hambourg, premier port d’Allemagne.
Des gens boivent dans une villa pour une fête, à Blankenese.
Suis-je vivant ?
Il pleut soudain et je ne prendrai pas le train le lendemain pour Berlin.
Sur cette image d’Edward Hopper, une illustration de American locomotive (1944), il semble que l’homme sur le quai n’est autre qu’un écrivain irlandais mais je me demande qui est cet enfant ? Est-ce un voyageur qui ne reviendra pas chez lui de sitôt ?
Ce train va-t-il dans les montagnes enneigées ?
Je garde en tête le chalet sous la neige où vit cette femme qui a confiance dans ces crèmes pour le visage, celles qui permettent de ranimer la sensualité ou la méditation mais jamais l’envie brutale.
À Blankenese, un couple de gardiens de villa dit : « Nous aimerions éviter la douleur des vieux militants, tourner la page et nous persuader qu’elle était belle notre lutte pour la justice sociale.
Nous n’y arrivons pas, la lutte pour la justice sociale nous manquera pour toujours. »
Cet homme est beaucoup trop à gauche pour prendre, même sexuellement, la position du missionnaire.
C’est un compliqué mais il ne manque pas de dignité.
Les dignités s’effondrent à cause de la colère.
Il faudrait peut-être devenir ermite, loin, dans la montagne enneigée.
Annie Dillard écrit : Beaucoup, parmi les chefs d’expéditions britanniques notamment, étaient des hommes d’une dignité personnelle étonnante. En lisant les récits de leurs derniers moments on est frappé par le formalisme de leurs manières. Lorsque le capitaine Oates, membre de l’expédition Scott, décida de se sacrifier sur la péninsule antarctique parce que ses pieds gelés ralentissaient la marche, il sortit de la tente, une nuit, pour se laisser congeler par le blizzard, après avoir dit à ses compagnons : Je sors et risque d’être un peu long.
Quand tu te lèves la nuit, tu vas dans ton bureau sans hésiter, une heure ou deux, rarement plus, tu mets une veste épaisse en laine et tu imagines parfois ces explorateurs perdus sous d’autres étoiles, dans le vent et le froid, loin de leur maison. Cela ressemble à un petit feu dans la nuit.
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