Dans la clinique psychiatrique, une psychiatre me présente Lilly.
Nous sommes au pavillon des Etoiles Filantes où l’on soigne, essaye de soigner, des stars déclinantes anciennes adeptes du kit Extase et Renaissance. Ces étoiles filantes ne sont pas toutes d’anciennes stars du cinéma pornographique. Loin de là.
Devant deux infirmières en sabots blancs, Lilly murmure : « Donnez-moi un peu de fabuleux, s’il vous plaît. »
Personne ne lui répond.
Bien que gloutonne insatiable Lilly ne grossit pas.
Ex-sorcière de cinéma de série B (mère de djinns, habituée des chouettes, forêts sombres, maisons désolantes, toiles d’araignées géantes), Lilly a connu le réalisateur Vincent Gallatino qu’elle traite de démon d’exception.
Fragile, elle fait comprendre à qui veut bien lui parler qu’elle a changé souvent de forme.
C’est un exemple de possession, dit-elle. Par prières personnelles, elle essaye de s’en prendre à la semence du personnel.
Elle écrit de longs discours sur les murs de la salle d’expression qu’elle prononce ensuite à la cafétéria.
La propriété semble l’obséder depuis quelques semaines.
Les relations de propriété, vous me l’aviez déjà fait justement remarquer, sont toujours des relations de violence, à un moment ou un autre. Il semblerait qu’aucune relation de propriété n’échappe à la violence.
Ce n’est pas tout.
Vous avez aussi ajouté que, d’autre part, la possession n’était pas favorable au désir. Lilly aurait probablement aimé vous entendre le dire.
La psychiatre (qui elle aussi a des sabots blancs, mais légèrement surélevé par rapport à ceux de l’infirmière) m’apprend que Lilly a essayé deux fois d’enlever des enfants. L’histoire n’est pas claire. Il y a au moins deux versions.
Lilly propose d’en faire un jour une bande dessinée parce qu’elle a beaucoup d’idées et qu’elle dessine aussi dans l’atelier d’expression.
Lilly est une fille extrêmement désobéissante.
Elle attend beaucoup de choses du monde. Elle a connu la mode glauque.
Contrairement à ce que je m’imaginais avant de la voir en action dans la cafétéria elle se révèle très apaisante et donne des conseils.
Il n’y a que certains grands alcooliques qui savent parler avec tant de sagesse, surtout en ce qui concerne la vie des autres.
En ce moment elle voudrait absolument changer de soleil.
Ça l’obsède.
Avant que nous partions elle pose une question : « Où est-ce que Jung a écrit qu’un vieil homme devait être maternel ? »
Nous n’en savons rien. Lily nous fait écouter Jean-Luc Parant : Il faut changer de soleil.
Là-dessus il pleut et nous écoutons.
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