Dans Notre-Ville nous avons nos sosies de star pour nous rappeler le bon temps passé dans le cadre des émissions Bonheur et Nostalgie, le fameux syndrome du Boeno.
Les sosies les plus professionnels apprennent la vie de leur modèle. Ils vont même parfois très loin dans cette expérience.
Sur une des scènes du Pico Pico, récemment, on pouvait entendre la vie de Margarita Cansino, née en 1918, à Brooklyn.
En 1922 Margarita Carmen Cansino a quatre ans, elle danse déjà avec un éventail et des castagnettes en compagnie de son père. Quand elle quitte Brooklyn pour la Californie elle a dix ans et elle rêve. A onze ans, elle danse toujours en professionnelle avec son père, pour le numéro des fabuleux Dancing Cansinos. C’est une petite reine de la danse espagnole qui enthousiasme les foules. A douze ans Margarita Carmen Cansino danse encore et toujours et a beaucoup de succès avec son père à travers l’Amérique dans de longues tournées.
Margarita Carmen Cansino ne danse qu’avec papa Eduardo.
Papa Eduardo est devenu danseur faute d’être matador.
Avec son père, dans les night-clubs, c’est toujours de la danse andalouse.
Margarita Carmen Cansino a douze ans et ne fait pas que danser le tango avec lui.
La fillette se vieillit, le père se rajeunit.
Tous les deux passent ensemble pour un couple. C’est comme ça. Ils jouent le couple.
La future grande déesse de l’amour femme fatale, Margarita Carmen Cansino, fait partie des Dancing Cansinos. Elle ne parlera que beaucoup plus tard des relations incestueuses. Bien plus tard. Quand elle ne s’appellera plus Margarita.
En dehors de la scène l’anxiété ronge Margarita, presque mutique. On la trouve pratiquement capable de rien, belle mais embarrassée dodue, une vraie potiche en dehors de la scène, qui bredouille ou marmonne selon les fois, rejoignant ainsi l’ensemble des artistes qui ont une deuxième personnalité quand ils montent sur une scène ou descendent dans l’arène. L’audace appartient souvent aux timides.
Un beau jour ensoleillé comme il y en a en Californie, dans la ville de tous les rêves et de tous les espoirs, le vice-président de la Fox Film Corporation, Winfield Sheehan, remarque la jolie Margarita Carmen Cansino. Pourquoi ne pas en faire une vedette de cinéma ? Elle a seize ans, peu confiance en elle, un peu naïve et prête à travailler dur.
Un des premiers films, ça commence bien, s’appelle L’enfer (avec Spencer Tracy), Margarita a dix-sept ans. Là-dessus Winfield Sheehan perd son poste de vice-président de la Renard Film Corporation. Margarita est remerciée aussi.
Caramba (du latin caracalum) ! Cela tient à peu de chose.
Mais la chance ne s’arrête pas là. Un autre beau jour ensoleillé californien Margarita Carmen Cansino rencontre Edward Judson, homme d’affaires qui décide tout de suite de la protéger et de bien s’occuper d’elle et de leur carrière.
Il a quarante ans, elle a dix-neuf ans. Il l’épouse.
Mais ce serait mieux, lui répète-t-il, comme dans un conte de fées, si elle acceptait de changer, de s’améliorer, de s’embellir. De se transformer.
Qui ne veut pas se développer personnellement ?
L’ancienne danseuse de la fabuleuse troupe des Cansinos, Margarita Carmen Cansino, accepte les travaux proposés pour se métamorphoser en déesse.
Elle obéit. Elle accepte les changements.
La chirurgie esthétique d’abord. On va la modeler. On va commencer par la tête. C’est ce que l’on voit le plus. On va tout reprendre.
D’abord elle est bien trop latino. Elle ne sera plus d’un brun si hispanique. On la teindra pour qu’elle devienne rousse, d’un roux foncé, auburn, un peu protestant.
Sa voix est trop haute, aussi. Elle devra baisser le ton de sa voix et parler de façon plus grave.
Ensuite on va redessiner sa chevelure. Pour cela il faut modifier l’implantation de ses cheveux qui est trop basse. La technique pour réaliser ça s’appelle l’électrolyse. Margarita profite des bienfaits de l’électrolyse durant des semaines. Cette technique consiste à envoyer, avec une aiguille, une décharge électrique dans chaque racine de cheveu, poil par poil. C’est longuet. Ce sont de nombreuses séances. C’est douloureux et désagréable. Faut-il souffrir et rester moche ou souffrir pour être belle ? Mais le résultat est là. Le front a bien gagné du terrain.
Son mari attentif, Edward Judson, l’emmène chaque soir en boîte de nuit et la présente, la montre. Un soir, c’est un producteur, Harry Cohn, qui est séduit et décide de cofinancer la métamorphose de Margarita.
Le prénom devra changer. Un peu trop bonne mexicaine, un peu trop cocktail.
Rita serait mieux.
Désormais on l’appellera Rita. Cansino ce n’est pas formidable non plus, ça fait danseuse de music-hall ou serveuse de Margaritas. On va l’appeler du nom de sa mère qui est très bien, celui-là, Hayworth. Bye bye Cansino ! aurait pu être une chanson.
Son premier film sous ce nom d’Hayworth s’intitule : Criminels de l’air…
A partir de là elle jouera Rita Hayworth jusqu’à la fin (Alzheimer précoce à cinquante ans).
Dans Gilda elle chantera Put the Blame on Mame.
When they had ther earthquake in San Francisco in 1906 (Lors du tremblement de terre à San Francisco en 1906), they said that old mother nature was up to her old tricks… (on a dit que Mère-Nature avait réussi un sacré tour).
That’s the story that went around, (ça c’est ce qui s’est dit) but here’s the real low-down (mais la vérité, la voilà) Put the blame on Mame, boy’s (c’est la faute de Mame, les gars).
A ce sujet, au Pico Pico, on se demande comment traduire Put the Blame on Mame.
C’est la faute à Maman, Mamy ? Ou à une femme prénommée Mame qui aurait provoqué le tremblement de terre ? A vous de voir.
Pour les futurs maris protecteurs de carrière, détail à ne pas sous-estimer : Des molaires de Rita Hayworth ont été arrachées pour que son visage soit plus délicat, plus charmant.
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